Maire-info
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Édition du jeudi 24 janvier 2019
Biodiversité

La fusion de l'AFB et de l'ONCFS consacre un changement de doctrine sur la politique de l'eau

L’Assemblée nationale a commencé à examiner hier soir le projet de loi portant création de l’AFB-ONCFS, c’est-à-dire fusionnant l’Agence française de la biodiversité et l’Office national de la chasse et de la faune sauvage. Cette fusion devrait être effective le 1er janvier 2020. Mais beaucoup de questions, notamment la place des élus dans la gouvernance de cet établissement, ne sont pas résolues à ce jour.
La décision de fusionner l’AFB et l’ONCFS pour créer un établissement provisoirement dénommé AFB-ONCFS (un autre nom sera choisi ultérieurement « par les parties prenantes », l’OFB étant évoqué) découle essentiellement du constat que l’Agence française de la biodiversité manque cruellement de moyens humains pour exercer ses missions. Cette Agence, créée le 1er janvier 2017 en application de la loi du 8 août 2016, était déjà issue du regroupement de plusieurs établissements publics : l’Onema, l’Établissement public des parcs nationaux et l’Agence des aires marines protégées. Selon un rapport de l’IGF et du CGEDD rendu en avril dernier, « 30 % des services départementaux de l’Agence française pour la biodiversité avaient, à la fin de l’année 2017, un effectif inférieur au seuil plancher jugé nécessaire à leur bon fonctionnement (5 agents par service) ». Quant à l’ONCFS, il est lui aussi touché par « une diminution tendancielle des effectifs »  qui « fait peser une menace sur la capacité de l’établissement »  à mener les missions de police que lui confie la loi. D’où l’idée de fusionner les deux établissements afin de mutualiser leurs ressources et leurs connaissances.
Une autre raison a conduit à cette décision : c’est celle de faire payer le fonctionnement de l’ONCFS, indirectement, par les Agences de l’eau, c’est-à-dire par les factures d’eau via les redevances. Cette nouvelle organisation éloigne encore davantage la France du principe « l’eau paye l’eau »  qui avait fondé la gestion de l’eau en France. On est d’abord passé à « l’eau paye l’eau et la biodiversité »  par la création de l’AFB. Puis, depuis la loi de finances pour 2018, qui a instauré un nouveau prélèvement sur le budget des Agences de l’eau d’une trentaine de millions d’euros pour participer au financement de l’ONCFS : l’eau paye désormais l’eau, la biodiversité, et la chasse (et accessoirement le budget général de l’État grâce à l’abaissement du plafond de recettes des Agences de l’eau).
La fusion des deux établissements (AFB et ONCFS) est finalement la conclusion législative de ces évolutions à travers lesquelles, petit à petit, l’État a distillé l’idée qu’il serait normal que les factures d’eau des usagers des services d’eau et d’assainissement (dont on rappelle qu’ils sont des services publics industriels et commerciaux) financent de toutes autres missions que celles liées à la gestion de l’eau.

258 millions d'euros en moins pour les Agences de l’eau
De façon pour le moins succinte, l’étude d’impact du projet de loi affirme que la création de l’établissement n’aurait pas d’incidence financière pour les collectivités territoriales – ce qui explique que le Conseil national d’évaluation des normes n’a pas été consulté sur ce texte. Pourtant, les « 258 millions d’euros de contribution des Agences de l’eau »  au nouvel établissement (le chiffre est précisé dans l’étude d’impact) sont autant de ressources en moins que les Agences pourront consacrer aux projets des collectivités. Ceci alors même que les Assises de l’eau ont mis en lumière d’importants besoins liés notamment aux conséquences des changements climatiques sur l’état et la répartition des masses d’eau.
Le projet de loi renvoie à des décrets ultérieurs un certain nombre de décisions, notamment la composition du conseil d’administration du futur établissement. On sait simplement que celui-ci sera « collégial », composé de vingt membres issus de cinq collèges. « La représentation des comités de bassin et des collectivités territoriales de tous niveaux est prévue pour tenir compte de leur forte implication dans la mise en œuvre des politiques de biodiversité », est-il précisé dans l’exposé des motifs du texte.
En ce qui concerne la chasse, il est à noter que le texte présenté au Parlement transfère aux fédérations de chasseurs la délivrance des permis de chasse en lieu et place de l’ONCFS, mais « confie à l’AFB-ONCFS la mission de gestion du fichier central sur les permis, les validations et les autorisations de chasser ».
Franck Lemarc

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